Les 30 ans du programme de parrainage de l’UNEQ : entrevue avec Ayavi Lake
Lorsque l’écrivaine Ayavi Lake a été retenue pour le programme de parrainage de l’UNEQ, jumelée en 2018 à la mentor Mélikah Abdelmoumen, elle ne se doutait pas qu’elle compléterait un recueil de nouvelles, que cet ouvrage serait publié en 2019 par VLB éditeur et remporterait le Prix des Horizons imaginaires l’année suivante. « Quand j’ai rencontré Mélikah, je lui ai expliqué mon problème : j’avais écrit plusieurs nouvelles, dont certaines étaient inachevées, et je n’arrivais pas à trouver une boucle. Mélikah m’a aidé à terminer ces nouvelles et finalement à terminer le recueil au complet ».
Question : Comment avez-vous découvert le programme de parrainage ?
Réponse : C’était un hasard. Je ne connaissais pas le programme de l’UNEQ et une collègue m’avait parlé d’un livre, Nirliit de Juliana Léveillé-Trudel, qui elle-même avait bénéficié du programme. C’est en ouvrant ce livre que j’ai lu la dédicace de Juliana Léveillé-Trudel à son parrain, Jean Désy, et que j’ai appris l’existence de ce programme. On était à quatre jours de la date limite pour déposer une candidature. J’ai postulé et j’ai été retenue.
Q. : Comment s’est déroulé votre travail avec Mélikah Abdelmoumen ?
R. : C’était formidable. À l’époque, ce n’était pas encore la COVID, il n’y avait pas de restrictions. On s’est retrouvées dans un café une première fois, juste pour faire connaissance, et après on a eu des rencontres régulières pour travailler mon manuscrit. J’étais bloquée à plusieurs endroits, je ne savais pas comment faire pour en sortir, et elle a compris ce que je voulais.
Aujourd’hui, on continue à se voir. On a réussi à créer une relation autre que professionnelle, au-delà de mon projet d’écriture.
Q. : Et quel était votre projet d’écriture ?
R. : C’était un recueil de nouvelles que j’ai intitulé Le Marabout. L’histoire se déroule dans Parc-Extension, où l’on suit plusieurs personnages qui habitent dans ce quartier. Je raconte leur histoire et je mets en avant le quartier. J’avais commencé à l’écrire en 2014, très lentement, à mon rythme, à l’époque où j’habitais dans le quartier Parc-Extension. Puis j’ai déménagé dans un autre quartier, et en 2018 j’étais bloquée pour différentes raisons : mes enfants, le travail, etc. Quand j’ai rencontré Mélikah, je lui ai expliqué mon problème : j’avais écrit plusieurs nouvelles, dont certaines étaient inachevées, et je n’arrivais pas à trouver une boucle. Mélikah m’a aidé à terminer ces nouvelles et finalement à terminer le recueil au complet, parce qu’il manquait encore des nouvelles. J’ai réussi à publier le recueil chez VLB. Et c’était grâce au parrainage.
La chance que j’ai eue, c’est que j’ai retrouvé Mélikah chez VLB après le parrainage, quand j’ai été publiée : elle était ma directrice éditoriale. Comme on avait déjà fait le parrainage ensemble, je connaissais sa façon de travailler. Ça m’a beaucoup aidé dans la mise en forme des nouvelles, dans ce que je voulais vraiment transmettre sur Parc-Extension.
Mais je dois dire que lorsque j’ai commencé le programme, même si j’espérais évidemment être publiée un jour, mon but était de débloquer ce recueil de nouvelles et d’avoir accès au milieu de l’édition. J’ai immigré au Québec en 2007, j’avais déjà écrit auparavant, et ça faisait longtemps que je tournais en rond, que j’envoyais des manuscrits aux éditeurs et que les portes étaient toujours fermées. Je me suis dit que grâce au programme, je pourrais au moins avoir accès au monde de l’édition, et après on verra. Finalement c’est grâce à ce programme que j’ai rencontré un éditeur et que mon recueil a été publié.
Q. : Quels conseils donneriez-vous à une écrivaine ou un écrivain qui souhaite bénéficier du programme aujourd’hui ?
R. : Comme je l’ai signalé, je n’avais pas le but de publier immédiatement. J’y suis allée en me disant que ce sera l’occasion de travailler avec une auteure qui aura un regard critique sur mon travail. L’essentiel, c’était ce regard critique : « Voici ce qui va, voici ce qui ne va pas. » Ma suggestion, pour quiconque veut bénéficier du programme, c’est d’y aller avec cette idée-là. Aller chercher une critique constructive et, après, voir ce qu’on peut en faire.
Pour être accepté au programme de parrainage, il faut soumettre un texte. J’ai choisi celui qui me parlait le plus, celui qui m’était le plus cher. Parc-Extension, c’était vraiment quelque chose qui faisait partie de moi. Je n’ai pas réfléchi en fonction du milieu de l’édition, je n’ai pas du tout choisi le texte qui aurait pu être publié le plus facilement. Je me suis demandé : « Moi, Ayavi Lake, aujourd’hui, dans mon parcours, quel est le texte qui me touche le plus ? »
Donc je suggère de choisir un texte, disons… J’ai envie d’utiliser le mot « authentique », mais je ne sais pas si c’est le bon mot. De choisir le texte qui colle le plus à la peau. Parce que le parrainage est une expérience assez intime : on laisse entrer dans nos écrits quelqu’un qu’on ne connaît pas, il faut dévoiler une partie de soi. Autant le faire avec un texte qui nous est très proche.
Je tiens à dire un gros merci à l’UNEQ. Ce programme, je ne le connaissais pas, je l’ai découvert par hasard et ce fut une porte d’entrée incroyable dans le monde de l’édition. Et je parle en tant que femme noire, avec tout ce qu’on connaît sur le monde culturel. Encore une fois, un gros merci.
⇒ Les 30 ans du programme de parrainage de l’UNEQ : entrevue avec Monique Deland
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